Les récentes manifestations en France soulèvent des problèmes aussi bien pour les autorités que pour les citoyens de ce pays. Elles regroupent des individus dont on ignore souvent la provenance géographique et sociale au sujet de projets de loi ou de décisions variés sans qu’on sache très bien ce qu’ils rejettent et quelquefois approuvent, malgré les banderoles. A-t-on affaire à des militants politiques ? à des délinquants de banlieue ? à des radicaux violents? à des modérés ? A des adolescents et lycéens dont c’est la première manifestation ? A des demandeurs d’emploi ou à des salariés? A des demandeurs d’asile ? A des groupes venus de l’étranger désireux de se joindre aux désordres ? Toutes ces questions se posent non seulement pour les politiques et les forces de l’ordre que pour les journalistes et les sociologues. Elles donnent lieu à toutes sortes de spéculations, et surtout conduisent, dans les quartiers ou les lieux où se déroulent les manifestations, à des dégradations qui coûtent très cher aux municipalités, à l’Etat et aux particuliers, qui voient quelquefois affluer à intervalles réguliers des masses de casseurs aux mêmes lieux et sur les mêmes parcours, sans parler des ordures qui s’accumulent dans nos rues quand la profession des éboueurs se joint à ces désordres en faisant ressembler nos cités à des bidonvilles de mégapoles.
Pour avoir participé à de nombreuses commissions d’hygiène et de sécurité municipales et nationales, j’estime avoir suffisamment de connaissance de ce dossier pour proposer la solution suivante.
Le principal problème posé par les déprédations urbaines est qu’elles sont produites, lors des manifestations, par des individus qui ne résident pas dans les quartiers où elles passent, et qui ne rencontreront, une fois passés, aucun des inconvénients que rencontreront les habitants de ces quartiers : vitrines brisées, mobilier urbain détruit, circulation rendue impossible, voies dévastées, voire habitations incendiées. Les commerçants qui voient passer, toujours sur les mêmes parcours, des dizaines de manifestations chaque année ont l’impression d’être pris en permanence en otages et ils sont rarement remboursés des dégâts. Aussi je propose que les manifestants, avant même chaque manifestation, se voient attribuer un badge indiquant leur lieu de résidence et leur région d’origine (mais pas leur identité, ce qui contreviendrait à la loi). Ce badge sera obligatoire, devra être visible, et son absence chez un manifestant donnera lieu immédiatement à une amende très élevée, ou à une arrestation immédiate. Ceux qui porteront ce badge hors de leur quartier de résidence seront, s’ils commettent des incivilités ou déprédations, punis plus sévèrement que ceux qui résident dans le quartier où ils les commettent, lesquels seront traités avec plus d’indulgence. Cette mesure aura de grands avantages. D’abord elle conduira les manifestants à manifester dans leur propre quartier, qui aura comme effet de limiter les grandes manifestations traversant les grandes villes, dont on sait que les centres ont une population moins dense. Indirectement, cela limitera le nombre des manifestants, qui même s’ils sont nombreux, seront répartis de manière plus équilibrée dans le territoire. Si par exemple dans une petite commune rurale il n’y a que deux ou trois individus désireux de manifester violemment, il y a peu de chances pour qu’ils échappent aux sanctions, et partant ils seront moins tentés de le faire. Ensuite, elle découragera les casseurs, qui sauront qu’on peut les identifier dans leur quartier, ce qui gênerait ensuite leurs démarches comme demandeurs d’emploi ou même comme mendiants et SDF, et savent qu’ils subiront directement les effets de leurs propres déprédations. Ajoutons que sur des populations moindres, le coût du maintien de l’ordre sera diminué. On se plaint des brutalités policières. Mais un policier sera moins tenté de tabasser s'il voit qu'un manifestant vient de son canton. Enfin, cette mesure écartera les manifestants étrangers, qui ne pourront disposer de ces badges. Ajoutons encore que les sociologues, qui peinent à obtenir des données pour leurs statistiques, seront en bien meilleure posture.
Ces badges seraient aux couleurs des communes auxquelles les manifestants appartiennent, ce qui sans nul doute donnerait à ceux-ci un sentiment de fierté d’appartenir à un territoire qui contribuerait à réduire leur désir d’aller casser du flic, du mobilier urbain, ou répandre des ordures en dehors de leur quartier, ou, s’ils gardent l’intention de le faire, limiterait leur champ d’action. On pourrait même, pour encourager cette localisation des manifestations envisager des récompenses pour ceux qui acceptent de ne casser que près de chez eux. Dans les grandes villes les casseurs d’un arrondissement seraient moins tentés d’aller dans un autre, et les commerçants dont les magasins sont régulièrement détruits n’auraient affaire qu’à des casseurs, pour ainsi dire, de proximité. Les badges pourraient aussi être aux couleurs des diocèses, voire des régions militaires, ce qui ne pourrait que renforcer le respect de l’Eglise et de l’Armée, qui s’est perdu chez les manifestants. Les paroisses jadis avaient leurs pauvres, pourquoi n'auraient-elles pas leurs casseurs attitrés? Les étudiants, qui forment nombre des troupes de ces mouvements, pourraient arborer les badges de leurs universités ou écoles, ce qui ne manquerait pas de stimuler leur esprit de corps, si essentiel dans les crises actuelles qui se réclament d’identités sociales et culturelles parfaitement étrangères aux fins de l’éducation.
On se plaint régulièrement du déficit de la démocratie en France et du taux d’abstention dans les élections. Il est souvent dû au fait que les citoyens ne perçoivent pas les enjeux nationaux. Un retour au niveau local, à l’appartenance aux territoires, même manifesté dans les dégradations de bâtiment urbains et de voies de circulation, ne peut manquer de renforcer la démocratie de proximité. Si chaque quartier ou commune a ses propres casseurs attitrés, n’est -ce pas déjà un pas vers la responsabilisation et le vote ?
On pourrait aussi penser que cette proposition n’a de valeur que répressive, et qu’elle ne sert que les intérêts de l’Etat, de la Police et des classes dirigeantes, qui paniquent, tout autant qu’aux siècles passés, face à la dangerosité des classes laborieuses. Ce serait une erreur calamiteuse. Au contraire, personne ne doute que si les gens manifestent, c’est pour de bonnes raisons, que les riches n’ont pas, et que leur indiquait jadis Baudelaire avec son slogan « Assommons les pauvres ». Assommés, les pauvres réagiront, bien plus efficacement au niveau local qu’au niveau national et international, où leurs révoltes seront exploitées par toutes sortes de forces qui prétendent les représenter, y compris par des causes soi-disant globales.
Je me flatte d’avoir l’oreille d’un député de ma circonscription. Je lui soumettrai cette motion pour qu’il l’appuie à la Chambre.
Tribulat Bienommé, citoyen
De bien modestes propositions !
RépondreSupprimerNous sommes déjà surveillés au moyen du bornage de nos téléphones portables, et de l'algorithme qui en est déduit, contenant les lieux et les personnes que nous hantons. C'est la méthode chinoise depuis la pandémie, et elle est peut-être déjà à l'œuvre dans le complot du Grand Reset noué au Forum de Davos.
RépondreSupprimerEn réalité, s'il est exact que les polices savent toujours qui fait quoi et comment, le machiavélisme constitutif de la pratique étatique est tel qu'il a intérêt à un certain désordre pour effrayer les citoyens, et les dissuader d'adhérer à un mouvement de revendication dans la rue. Les casseurs, qu'ils agissent ou non dans leur quartier, sont les idiots utiles de l'État, qui jouent plus ou moins sans le vouloir un double jeu. On craint d'utiliser une vieille idée reçue en disant cela, mais on ne sait jamais bien quelles sont les relations précises entre les provocateurs et agitateurs d'une part, et les polices parallèles d'autre part.
Il y a eu un temps, les années 1970, où, dans les manifestations, on reconnaissait bien les policiers en civil des Renseignements Généraux, ayant la tête du beau-frère de Cabu, qui cassaient les vitrines.
On peut aussi poser le problème de la violence populaire à la manière de "Philosophie Magazine", en opposant la légalité de l'État à la légitimité des casseurs, et en se demandant si le type de légitimation de leur action est acceptable moralement.
Tribulat Bonhomet est peut-être un ancien gauchiste, qui dans sa jeunesse avait détourné "On chante dans mon quartier", la célèbre chanson de Francis Blanche à la Libération.
https://www.cambridge.org/core/books/abs/irish-political-writings-after-1725/proposal-for-giving-badges-to-the-beggars-in-all-the-parishes-of-dublin/A7A7956453E9C0C67B8CAEB63526964A
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