A la manière de Victor Klemperer
Ne pas confondre les détournements ou les galvaudages
avec la political correctness :
cette dernière croit réparer un outrage (à telle ou telle minorité, handicapée,
politique, sexuelle), masquer ou valoriser un événement historique, une thèse,
en le requalifiant. Les détournements sont des usages intentionnels, destinés à
donner à une circonstance, un métier, une institution une valeur plus grande
que celle qu’ils ont en réalité, à les embellir. On peut dire que ce sont des
métaphores, mais aussi des métonymies. La plupart du temps, ce upgrading vient du marketing.
Mais comme le marketing s’étend partout, à la politique et au domaine savant, les
détournements sont partout. On peut aussi les prendre pour de petites ironies de situation, si elles n'étaient pas entièrement intentionnelles. Mais on peut aussi les prendre comme des modes de l'art du mensonge.
Voici des exemples connus et anciens, d’autres
récents.
Concept . Ce mot n’était utilisé que par les philosophes, depuis les années 1980
il a désigné en marketing une idée, une conception, d’un meuble, d’une auto, d’une
architecture, etc.
Vivre . On vivait jadis un amour, une aventure, une épreuve, ou sa vie. Quand
les premiers TGV apparurent j’eus la surprise d’entendre le contrôleur nous dire
à chaque voyage : « Nous espérons que vous avez vécu un agréable
voyage ».
Université d’été. Comme plus personne ne sait ce qu’est une université, on peut à présent utiliser
ce nom dans n’importe quel contexte. Les partis politiques ont détourné ce
terme pour désigner leurs rencontres estivales. Il est très probable que c’est
un détournement d’école d’été, mais
comme université faisait mieux, on a pris le second.
C’est un détournement des rites ou habitudes
académiques vers la politique ou le social. L’ironie, ou l’explication, est que
ce détournement se produit précisément au moment où l’univers académique est
dévalorisé et méprisé ( personne ne dirait « fac d’été », et le terme
de « prof » a dans l’univers politique mauvaise réputation ( Romano
Prodi était appelé il professore, de
même que Raymond Barre). Mais il y a aussi l’inverse : l’invasion de l’univers
académique par celui du spectacle ou celui des habitudes américaines
Master class. Désignait jadis la leçon donnée par un grand musicien, chef d’orchestre
ou chanteur, donnée aux débutants dans une circonstance spéciale. A présent des
universitaires supposés réputés donnent, dans des colloques, des « master
classes », et se trouvent ainsi promus au rang de maîtres. l est vrai que M. Jourdain avait son maître de ballet et son maître de philosophie.
Brown bag Ici importation d’un terme désignant
une rencontre informelle ou un invité sur un campus donne un talk, la plupart
du temps vers midi, et où, faute de temps, on mange un hamburger ou un sandwich
(souvent dégoulinant le ketchup et avec des
frites, en sirotant un coca) en écoutant le speaker. Cocasse car la plupart du temps les brown bags en France se font dans des lieux bien peu ressemblant à
des campus américains.
Créateur. Désignait jadis un artiste ayant une capacité créatrice démontrée. A
présent désigne un couturier, voire un chef de restaurant.
Mise en scène, se disait jadis d’une œuvre de théâtre, d’opéra ou de cinéma. Se dit
aujourd’hui d’un repas organisé par un chef dans un restaurant, qui "met en scène les plats"
Républicains. Se disait jadis de ceux qui s’engagent envers les valeurs de la
République, et une fois celle-ci établie, de tout ce qui relève des droits,
devoirs et idéaux de la République française. Se dit à présent d’un parti
politique particulier, celui de Nicolas Sarkozy, qui dans son discours de Saint
Jean de Latran, se réclamait d’une « laïcité positive » et déclarait :
« Un homme qui croit, c'est un homme qui espère. Et l'intérêt de la République,
c'est qu'il y ait beaucoup d'hommes et de femmes qui espèrent. »
Le phénomène décrit ici a été diagnostiqué depuis longtemps par Musil, quand Ulrich s'étonne de ce qu'on qualifie un cheval de course de "génial". cf le blog de Philalèthe
Le phénomène décrit ici a été diagnostiqué depuis longtemps par Musil, quand Ulrich s'étonne de ce qu'on qualifie un cheval de course de "génial". cf le blog de Philalèthe
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Bonjour,
RépondreSupprimersauf erreur de ma part, il me semble qu'en matière musicale, les « master classes » ne s'adressent pas à des débutants, mais surtout à des musiciens d'un bon niveau qui en attendent des progrès tant au niveau technique qu'à celui de l'interprétation. Le but est le perfectionnement professionnel et non la simple formation.
En ce qui concerne le terme de « création », faut-il incriminer fatalement un relent démagogique dans l'application de ce terme à la couture ou à la cuisine, lorsqu'on a affaire à un incontestable niveau d'excellence ? On ne voit pas très bien, dans ce contexte, en quoi le terme serait galvaudé...
oui, vous avez raison pour les master classes musicales. Mais cela ne change rien au point que j'avançais sur la transposition au contexte universitaire. Cela renforce même mon point, car les "master classes" d'universitaires ne sont pas aussi sélect que pour les musiciens.
RépondreSupprimerQu'on a appelle "créateur" un couturier ou un restaurateur est en effet passé dans la langage courant , comme d'ailleurs la plupart des expressions listées ici. On a fini par oublier que cela s'appliquait à Goethe ou Michel Ange. Le point n'est pas que les couturiers ou les restaurants ne soient pas créatifs ( adjectifs) , mais qu'on leur attribue le nom ( "créateur") .
Voir ( et je l'ai ajouté dans le texte suite à votre suggestion) Musil qui discute le fait qu'on appelle un cheval "génial"
Pardon d'insister. Ainsi, tous les créateurs sont créatifs, mais tous les créatifs ne sont pas créateurs. Mais qu'est-ce qui manque donc aux créatifs pour n'appartenir pas à la confrérie prestigieuse des créateurs ? Je ne vois rien d'autre pour leur refuser ce titre que le présupposé discutable suivant, celui d'une hiérarchie traditionnelle des sens: ils ne travaillent pas dans le registre sensoriel noble (la vue ou l'ouïe) mais vulgaire (l'olfaction, le goût), celui qui n'invite, dit-on, à aucune élévation de l'esprit.
SupprimerEnsuite, ce n'est pas le « restaurateur » en tant que tel à qui peut être éventuellement attribuée la qualité de créateur, mais le cuisinier, c'est-à-dire celui qui travaille à une nouvelle composition de saveurs, comme le créateur de parfums travaille à une composition inédite de fragrances.
La question du « génie » est un autre problème : que le terme "génial" soit utilisé abusivement pour qualifier n'importe quel objet qui suscite l'enthousiasme, fût-ce d'un moment, n'entraîne en rien qu'il soit illégitime de compter la couture ou la cuisine parmi les activités créatrices. On en sait qui se plaignent de ce qu'une paire de bottes puisse être qualifiée de géniale et qui refont le coup du cheval génial de Musil, pour accréditer la menace d'un « tout se vaut ». Sérieusement, va-t-on croire que la valeur des œuvres de Michel-Ange, de Rembrandt, de Shakespeare, … sera compromise par ce tic de langage ?
Si encore on s'en tenait à dire que le terme de « création » n'est pas applicable aux activités humaines mais ne doit être réservé qu'à Dieu, seul être capable de faire mentir le principe « ex nihilo, nihil », on comprendrait mieux.
scuzez: je usi ben d'accord que quantité de gens, y compris des dresseurs de puces , sont créatifs, et peut être même créateurs. Ce que je relevais est qu'on leur donne le NOM " créateur" . On appelle le couturiers "créateurs " , et ce nom les désigne exclusivement. Par extension ce nom est attribué aux restaurateurs eux aussi appelé "créateurs" - CREATEURS nom , pas adjectif.
RépondreSupprimerEst ce plus clair ?
par ailleurs ce que vous appelez un tic de langage, moi , je l'appelle un fait de civilisation . Voir Klemperer.
Au départ, dans votre liste, vous ne disiez pas que le mot « créateurs» désignait aujourd'hui « exclusivement » les couturiers ou les chefs de restaurant, ce que vous faites maintenant. Mais même si l'on vous donne raison sur ce point, ce qu'on peut concéder à la rigueur si du moins on limite l'enquête à la lecture des magasines de salles d'attente, on ne voit nulle tendance manifeste à retirer ce titre aux peintres, aux compositeurs, poètes, écrivains, etc.
RépondreSupprimerPar ailleurs, s'il faut parler de Victor Klemperer, de quel "imperium" s'agit-il au juste ? Avons-nous, derrière les mots ou les expressions que vous relevez, l'équivalent d'un totalitarisme national-socialiste qui façonne la langue et les esprits pour imposer une vision du monde unique?
S'il s'agit du ...marketing, ce qui semble ressortir de vos propos, le caractère hasardeux de la comparaison sur le plan historique, même dans un jeu du type "à la manière de... » rend le propos pour le moins arbitraire.
J'aurais du préciser en effet que ce que je visais était le NOM pas l'ADJECTIF. Je pansais avoir été clair, mais le stye bref de mes petits billets est certes la cause. c'est évidemment la nominalisation de créateur pour les couturiers et autres que je visais. Je n'ai jamais voulu refuser à un couturier le droit d'être créatif, mais seulement celui de monopole du nom "créateur". Lisez n'importe quel magazine, vous verrez que si on parle des "créateurs", c'est de Valentino, Armani, Gian Franco Ferré, etc Par extension a parlé de "créateurs" en restauration . C'est du vocabulaire de marketing en effet, mais ma suggestion, qui n'est qu'une suggestion et pas une affirmation devant l'Académie des sciences morales et politiques ou publiables dans dans une revue de sociologie (mes propos, comme vous dites, sont des greguerias, assumées comme telles) , est bien que ces manières de parler dessinent une tendance. Dans ce blog j'ai déjà parlé de LTNI au sujet du vocabulaire de l'Imperium Numéricum. Klemperer a beau parler d'une autre époque et d'une autre langue, est il interdit de faire remarquer que les mots imposent un usage, qui a des aspects sinon tyranniques du moins autoritaires? Relisez Klemperer. Il ne dit jamais jamais que l langue de la TLI est tyranique. Il dit au contraire qu'elle s'impose souvent doucement, par petites touches, l'air de rien. Je pense que le langage de la political correctness , et ce langage de détournements dont j'ai donné quelques exemples, mais qui devrait évidement être documenté plus, , a des tendances insidieuses. Pour prendre un autre exemple dont je n'ai pas parlé dans ce billet, tout le vocabulaire "pedago" me semble autoritaire et biaisé. Vous trouverez peut être que le fait de renommer les étudiants " apprenants" et les professeurs "intervenants" est anodin, mais pas moi.
RépondreSupprimerMais évidemment vous n'êtes pas obligé , cher Anonyme, d'être d'accord avec moi et tout le monde a le droit de trouver mon propos arbitraire.
Tout à fait d'accord, à propos de Klemperer, sur le caractère insidieux d'une langue façonnée tout exprès pour asservir les esprits sans avoir l'air d'y toucher. Orwell n'a eu qu'à recueillir ce précieux travail pour forger un des thèmes essentiels de son chef-d’œuvre (1984) : la novlangue.
RépondreSupprimerS'il y a une novlangue dans le lexique "pégago", elle est aujourd'hui le plus souvent citée pour être la cible de moqueries ou d'attaques devenues rituelles et on ne voit pas très bien dans ces conditions jusqu'où s'étend son influence supposée pernicieuse au-delà des milieux qui la produisent. On aurait besoin ici d'une enquête de terrain ! Peut-être en avez-vous les résultats, mais pas moi ...
Encore le même.
Malgré la pauvreté de mes exemples ( cela dit, j'en ai donné 8 et vous n'en avez commenté qu'un seul ; les autres sont ils aussi peu convaincants?) je crois avoir mis l'accent sur un aspect klemperien du langage de l'époque - sans doute présent à toutes les époques, mais plus aujourd'hui que le marketing et le spectacle sont devenus la loi - l'hyperbole et le détournement. J'ai aussi indiqué un lien avec le phénomène de l'ironie de situation. Tout ceci demanderait en effet à être développé. Je conviens que je devrais faire une enquête détaillée. Ce n'est pas le but de mon blog. Je publie dessus des greguerias et des soties. Mais ces termes aussi sans doute sont un peu prétentieux. Pour mes publications "sérieuses", voir mon site internet officiel et ma page academia edu
Supprimerhttps://sites.google.com/site/pascalengelehessfr/
https://ehess.academia.edu/PascalEngel
PS vous dites que Orwell a recueilli précieux travail de Klemperer, mais l'avait il lu ? Je ne sais pas trop. Klemperer a publié LTI en 1947, et Orwell sont essai sur le langage totalitaire en 46, et 1984 en 49. LTI a été surtout connu en allemagne après 68, et en France encore plus tard.
Frappé par la convergence des analyses de Klemperer et Orwell, deux noms par ailleurs souvent associés dans les études sur le langage totalitaire, je me suis en effet avancé imprudemment à supposer que le second avait lu le premier, mais je n'ai pas de données sérieuses pour l'établir.
RépondreSupprimerSur ce point, pour retrouver un blog qui vous est familier :
http://www.philalethe.net/post/2012/09/02/George-Orwell-et-Victor-Klemperer-%3A-point-commun-entre-la-langue-anglaise-et-la-langue-du-Troisi%C3%A8me-Reich.
j'avais lu ce post de blog....il a inspiré ma note en partie
RépondreSupprimermais voyez the Cambridge companion to Orwell. Il ne semble pas dire que GO ait lu V.K.
pour revenir au sujet , le langage du marketing n'est certes pas totalitaire, mais je suis en désaccord avec vous sur le fait qu'il se confinerait, comme la novlangue pedago à un domaine restreint. Cette même novlangue me semble d'ailleurs fort répandue, car plus d'une fois, dans des contextes non académiques on m'a présenté comme un "intervenant" , et aussi quelquefois comme " animateur" .
Evidemment cela sonne moins compassé que "professeur".
Tout à fait, pas plus que ceux qui rapprochent les deux noms dans les études sur ce sujet que j'ai pu découvrir. La convergence de vues ne repose pas en effet sur une filiation, je fais ici mon mea culpa...
RépondreSupprimerCe que je voudrais comprendre seulement, c'est le degré de nuisance que vous attribuez à ces détournements de langue qui sont souvent réductibles à des effets poudre aux yeux qui n'abusent que ceux qui consentent à se laisser abuser. Pour prendre un de vos exemples, les "concepts" qui pullulent dans le vocabulaire de la publicité ou du design sont là pour donner de la profondeur ou de la cérébralité à des activités en mal de reconnaissance qui ne veulent pas être réduites à de la pure incitation à la consommation. Mais qui est dupe ? Et surtout le parallèle s'impose-t-il avec la LTI de Klemperer qui est l'émanation d'un contexte autrement tragique ? Le seul point commun est le caractère pompeux et somme toute mensonger (d'accord là-dessus avec vous) des termes ou tournures employés.
A l'inverse, si je comprends bien, il faudrait aussi protester contre la substitution de termes platement fonctionnels ("intervenant", "animateur",...) à des termes ressentis comme trop pompeux ou auréolés d'une autorité désormais aussi désuète qu'insupportable
("professeur").
L'hypothèse à envisager serait de voir dans ces usages de la langue les effets (ou méfaits) d'un égalitarisme à courte vue : hausser ce qui est bas, rabaisser ce qui est haut...
Il y a trois choses à distinguer :
RépondreSupprimer1) ces glissements de sens ( et d'usage) existent-ils selon vous ?
Selon moi, oui . Vous semblez le niez, par exemple pour "créateur" ou "concept"
2) sont ils intentionnels, ie le produit d'une politique linguistique consciente, comme le sont par exemple la féminisation / genrisation des titres et fonctions ( Madame la Procureuse? , Monsieur le Sentinelle ? , Madame l'Ordonnance ? ) Selon moi oui, ils sont le produit d'une politique concertée , associée à l'usage du langage de marketing .
3) sont-ils bénéfiques ou nuisibles ?
Concernant 3) vous n'y voyez aucun inconvénient, apparemment , d moins pour l'unique exemple , qui semble seul vous toucher, des restaurateurs et des couturiers. qu'avez vous à dire sur le détournement de "Républicain" ?
Ma suggestion dans cette brève gregueria est que , de manière systématique, lente et progressive, se met en place un novlangue qui
est parfaitement concertée, visant à désigner les professeurs comme des "intervenants", les voyages en train comme des moments que 'on "vit", des institutions académiques comme des types de spectacle, les droits politiques de tout un chacun comme une doctrine particulière . Rien , certes , dans tout cela , de totalitaire, au sens qu'étudiaient Orwell et Klemperer. Mais néanmoins une mise en place concertée, destinée à changer le sens des institutions et des activités humaines. I.e d'imposer des normes. Quant à moi, je ne vis pas mes voyages ordinaires, je suis un professeur, je ne fais pas de brown bags à midi, je ne suis pas de master class, ni n'en donne, et je revendique le droit d'être républicain, sans que cela signale mon alégeance à un parti .
Pour un autre exemple que j'ai fustigé récemment, la fait de pouvoir "doctorer" aisément des gens sur leurs "acquis". voir
http://www.qsf.fr/2015/05/11/dottore-par-pascal-engel/
Je me permets d'ajouter à votre liste un petit exemple, dans le même style que "intervenant/animateur" et "apprenant": dans les établissements scolaires, les surveillants s'appellent désormais "assistants d'éducation" (AED). Cela donne bien sûr lieu à des épisodes assez cocasses, du type suivant : X, "assistant d'éducation", appelle au téléphone l'un des parents de Y, pour l'informer des (trop) nombreuses absences de son rejeton:
RépondreSupprimer- Bonjour, c'est X, assistant d'éducation au lycée truc; je vous appelle concernant les absences de machin..."
- Assistant de quoi??
- d'éducation...
- ??!!?
- euh... surveillant...
- ah oui, pion quoi!
Dans cette anecdote, faut-il vraiment prendre partie pour le parent d'élève qui ne veut pas bouger d'un pouce dans ses habitudes langagières et qui joue sans vergogne au franchouillard à qui on ne la fait pas avec des dénominations jugées pompeuses parce qu'elles dépassent le monosyllabe ?
RépondreSupprimerBref, je ne vois pas le rapport avec la LTI (ou la Novlangue) et l'asservissement rampant des esprits dont elle est l'instrument majeur.
Un autre anonyme.
le parent d eleve est peut etre franchouillard mais il a raison s il entend s insurger contre la renomination. on avait a la place de "pion" jadis le terme "surveillant" . ce n etait pas si mal. et professeur ne ssemble pas etre si mal non plus, puisque les professeurs des ecoles preferent ce nom a " instituteur", qui a donne " instit".
Supprimerplus serieusement je me suis livre sur ce blog a pas mal de discussions de la nov langue infromatico educative. voir la rubique " imperium numericum" ou j essaie uneu d imiter Klemperer.
Comme quoi le mot "professeur" n'est pas partout honni et systématiquement remplacé par "animateur" ou "intervenant"...
RépondreSupprimerA vouloir trop prouver ...
mais au contraire ! c est quand les instituteurs renoncent a leur beau nom pour epouser celui hybride de professeur des ecoles
Supprimerque la novlague a gagne. je crois que je prouve juste ce qu il faut...
De l'art d'avoir toujours raison...
RépondreSupprimerde l art de chercher la mouche
Supprimer"Ne combattez l'opinion de personne; songez que si l'on voulait dissuader les gens de toutes les absurdités auxquelles ils croient, on n'en aurait jamais fini, quand bien même on atteindrait l'âge de Mathusalem..." (Aphorismes sur la sagesse dans la vie, in Parera et Paralipomena, Coda, p.380)
RépondreSupprimerA bientôt !
schopenhauer a raison. mais encore faudrait il qu on puisse savoir quelles sont les opinions qui vous sont opposees....
RépondreSupprimerCorrection : ParerGa et Paralipomena...
RépondreSupprimerÀ plusieurs reprises, j'ai entendu à la télé ces dernières semaines le terme décès utilisé pour désigner une mort animale (décès d'une antilope par exemple). Cette révision à la hausse linguistique de la mort animale est un indice minuscule d'un courant très fort de promotion des bêtes.
RépondreSupprimeravez vous remarque que l on dit en revanch souvent de tel
RépondreSupprimermalfaiteur ou contrevenat victime d une bavure policiere qu il a ete " abattu" par un policier ,
Et en revanche tout soldat français tombé au combat est quasiment transformé en héros...
RépondreSupprimerPlus généralement toute victime est aujourd'hui magnifiée du seul fait d'être victime...
Enfin quand parlera-t-on de l'héroïsme des vaches conduites à l'abattoir et de leur stoïcisme qui devrait nous servir de leçon ? C'est pour bientôt...
En suivant ces échanges, la question qu'on peut se poser est évidemment celle de savoir en quoi les exemples proposés relèvent d'un "mise en place concertée" (je cite fidèlement l'auteur du billet) d'une novlangue (le "décès" d'un animal, un homme "abattu", l'"héroïsation" de toute victime, etc). Chacun d'entre nous pourrait indéfiniment énumérer des expressions ou des glissements sémantiques qui n'ont pas son agrément ou qui lui paraissent symptomatiques d'un dévoiement de la langue, mais l'exercice à la longue donne des résultats bien éloignés du sujet, même en tenant compte des libertés qu'on peut s'accorder dans le cadre d'un jeu du type à la manière de...". Ce qui est surprenant, c'est que certaines analyses prétendument inspirées de Klemperer fleurent parfois le conspirationnisme : "on" façonne la langue, "on" veut nous faire croire qu'un cuisinier est un créateur ( nom ou adjectif, peu importe !), que la disposition des plats sur une table acquiert la même dignité qu'une mise en scène théâtrale, etc. M'est avis qu'il y a beaucoup d'autres phénomènes qui méritent l'indignation et que celle-ci ne doit pas être gaspillée inconsidérément tant il faut en avoir en réserve pour d'autres causes.
RépondreSupprimerQuand un propos se veut satirique, il est à prendre ou à laisser, il nous agrée ou nous déplaît, il est dès lors vain de vouloir argumenter. Comme dans le domaine de l'opinion évoqué par Schopenhauer, la difficulté est de savoir ce qui au juste pourrait avoir valoir de preuve ou de contre-preuve, puisque nous sommes ici dans un registre où l'on renvoie le lecteur vers des articles plus sérieux lorsqu'il demande avec une insistance déplacée parce que rétive à toute complicité, des justifications ou des explications.
Cela dit l'incitation à relire Klemperer est bienvenue...
l'ennui avec les blogs est qu'on lit rarement les billets anterieurs. dans de nombreux billets j ai decrit la LNI et en effet j ai joué, à défaut de pouvoir vraiment imiter, au petit klemperer. jai decrit des usages (voir par mon billet sur l'expression "une belle journee"). je n ai pas pretedu qu 'ils etaient tous intentionnels; mais certains le sont: le nieriez vous pour "républicain"?pour la novlangue numerique?
RépondreSupprimeret oui je pense que souvent ce vocabulaire est destiné à imposer aux gens des directives. par ex dans une université quand on insiste pour m appeler "apprenant" c'est avec un but précis...ce nest pas une cospiration: c'est ouvert et explicite
Dans LTI, (éditions Albin Michel, Pocket Agora, p. 39 ) Klemperer écrit, à propos de la toute première période post-hitlérienne : « On parle tant à présent d'extirper l'état d'esprit fasciste, on s'active tant pour cela. Des criminels de guerre sont jugés, de « petits Pg»[1] (langue du quatrième Reich !) sont écartés de leurs fonctions officielles, des livres nationaliste retirés de la circulation, des « places Hitler » et des « rues Göring » débaptisées. »
RépondreSupprimerLa place de la LQI était déjà donc occupée, le philologue soulignant ici la persistance de la LTI
dans la langue allemande après l'effondrement du nazisme...
[1] : abréviation de Parteigenossen [camarade du Parti], membre de base de la NSDAP.
Ce que j'appelais quatrième Reich, c'est le nôtre, celui de notre société d'aujourd'hui.
RépondreSupprimerDans la citation, la parenthèse ("langue du quatrième Reich" avec point d'exclamation) est de Klemperer lui-même. Pour être à jour en parlant de notre présent, il faudrait donc parler de Lingua Quinti Imperii, à moins d'alléguer que nous ne sommes pas sortis de la quatrième, telle que l'entend notre philologue !
SupprimerLSI (sexti) si vous voulez...
SupprimerJe n'en doutais pas un seul instant...
RépondreSupprimerSi on cherche un illustre modèle à ce travail d'interprétation des changements linguistiques et si on souhaite une oeuvre faite dans des conditions un peu moins sombres, moins manifestement tragiques, le nom de Karl Kraus s'impose, ajoutant en plus une dimension satiriste qui fait complètement défaut à Klemperer et que vous, vous appréciez. C'est lui qui, dans le numéro 108 de Die Fackel cite ces lignes de Tacite "speciosa nomima praetexuntur".
RépondreSupprimerCe que j'apprends en lisant un livre de très grande qualité, "Karl Kraus, apocalyptic satirist" de Edward Timms (p.43), livre publié en 1986 mais malheureusement non encore traduit en français.
Timms à propos de Karl Kraus :
RépondreSupprimer" His method, like that of the prophets, was to discern a sinister meaning in words which others disregarded." (vol I, p.58)
L'idée de Kraus, qu'a beaucoup commentée Bouveresse, est que quand la langue commence à déraper, la pensée et la vie en font autant.
RépondreSupprimermerci pour la ref, je ne connais pas ce livre.
Samedi 24 Juin : aux actualités de 13h sur France 2, un sujet sur une fleur carnivore : au moment où la caméra filme l'incision de la tige de la fleur, on entend le commentaire suivant de la part du journaliste :
RépondreSupprimer" on fait une découverte macabre : un charnier d'insectes "
Après tout, étant enfant, je fis une fois une " tombe " improvisée pour un oiseau. Les cimetières pour chiens ne devraient ils pas être renommés par des termes tels que funeraria canensium ?
RépondreSupprimerOui et y enterrer les chiens reviendrait à faire l'inverse de Diogène !
RépondreSupprimer" Certains disent que Diogène mourant ordonna qu'on le jetât en terre sans sépulture afin que n'importe quelle bête sauvage pût prendre sa part, ou qu'on le poussât dans un trou et qu'on le recouvrît d'un peu de poussière (...) afin qu'il fût utile à ses frères." (Laërce VI 79)
Oui et y enterrer les chiens reviendrait à faire l'inverse de Diogène !
RépondreSupprimer" Certains disent que Diogène mourant ordonna qu'on le jetât en terre sans sépulture afin que n'importe quelle bête sauvage pût prendre sa part, ou qu'on le poussât dans un trou et qu'on le recouvrît d'un peu de poussière (...) afin qu'il fût utile à ses frères." (Laërce VI 79)