Luther face au diable |
Dans un billet précédent ( "bilan d'une vie d'enseignant"), je me mettais moi même en garde (via Sénèque, cité par Foucault) contre la tentation d'essayer d'apprendre quelque chose à des ignorants. En voyant les réactions au billet précédent, je me rends compte que je suis tombé dans ce piège, et constate que j'aurais dû m'éviter de parler de Foucault à des lecteurs n'ayant aucune idée du contexte et des travaux de Foucault, encore moins, apparemment, des films de Bergman.
Quand il était à Uppsala, comme je l'ai dit, Foucault écrivait son Histoire de la folie. Il menait des travaux sur la folie à l'âge classique, et s'intéressait à la Renaissance, sur laquelle le livre s'ouvre par un chapitre retentissant, Stultifera navis. Dans le chapitre (aussi célèbre) sur Le grand renfermement., Foucault discute de la misère à la Renaissance: la misère n'est plus comme au Moyen Age pauvreté reconnue: Dieu est aussi présent dans la misère que dans la richesse.Le pauvre n'a plus de gloire promise, mais il est prédestiné pauvre, et reçoit son châtiment. Il ne peut invoquer que la colère de Dieu, ou se lamenter comme Job. Luther refuse le salut par les oeuvres: les hommes ne peuvent être justifiés devant Dieu par leurs efforts. Conséquence: le Diable est là tout le temps, il guette à chaque minute, et seule la foi peut le chasser. Ce thème est sans cesse présent dans les Propos de table de Luther, Tischreden (1566) qui s'ouvrent par un chapitre sur les apparitions, les revenants, le Diable, les sorciers et les incubes, qui est un recueil d'anecdotes sur les interventions du Diable dans la vie des humains. Quelques exemples !
"Un pasteur, près de Torgau, vint trouver le docteur Luther, se plaignant que le diable le tourmentait Le docteur lui dit : Il me vexe et me tracasse aussi,mais je lui résiste avec les armes de la foi, et je lui oppose ce verset : « Mon Dieu est celui qui a créé l’homme, et toutes choses sont sous ses pieds. » Il lui raconta ensuite l’histoire d’une dame de Magdebourg qui avait mis Satan en déroute en faisant un pet. Ces exemples ne conviennent pas à tous les hommes; ils sont dangereux; car le diable est un esprit de présomption, et il ne cède pas facilement. On s’expose à bien des périls lorsqu’on veut faire plus qu’on ne peut; il en est des exemples. Un homme se glorifiait de son baptême, et le diable s’étant présenté à lui, la tête munie de cornes, il lui arracha une de ses cornes ; un autre voulut en faire autant, et le diable le tua."
"Le ministre du village de Supz, près de Torgau, vint trouver le docteur Luther, se plaignit à lui que le diable faisait dans la nuit un grand vacarme dans sa maison, brisant toute sa vaisselle et tous les vases de bois, ne lui laissant aucun repos ; il dit que le diable lui jetait à la tête les assiettes et la vaisselle, et souvent il l’entendait rire, mais il ne le voyait pas. Ce manège durait depuis un an, et la femme ainsi que les enfants du pasteur ne voulaient plus rester dans la maison, mais bien en sortir sans délai. Le docteur Luther parla ainsi à ce ministre : « Cher frère, sois ferme dans le Seigneur et sois certain de ta foi en Jésus-Christ ; ne t’inquiète pas de ce meurtrier, le diable ; souffre avec patience ses passe-temps, et résigne-toi au dégât qu’il peut occasionner à ta vaisselle et à tes assiettes, car il ne peut rien entre prendre contre ton corps ni contre ton âme. Tu l’as éprouvé jusqu’ici ; l’ange du Seigneur se tient à tes côtés ; il te protège et veille sur toi. Laisse donc le diable s’amuser, s’il le veut, avec des plats et des assiettes ; toi, adresse tes prières au Seigneur ainsi que ta femme et tes enfants, et dis : « Retire-toi, Satan ; ce n’est pas toi qui es le maître dans cette maison ; c’est moi. » Le diable ne peut être que notre ennemi, car nous combattons contre lui avec la parole de Dieu ; nous jetons le trouble dans son empire, etc. Il est le maître et le dieu du monde, et il a un pouvoir supérieur à celui de tous les rois, princes et seigneurs de la terre; aussi veut-il se venger de nous, ce qu’il tente sans relâche et ce que nous voyons
et sentons."
Foucault connaissait ces textes, et les commente indirectement. Mieux, il fit des fiches sur "Luther et la sorcellerie" , où il discute ces propos de Luther. Ces fiches ont été archivées à la BNF et sont ici:
http://eman-archives.org/Foucault-fiches/items/show/13583?context=pdf
Foucault note entre autres dans les Tischreden la phrase : "je crois que les esprits frappeurs (Poltergeisten) viennent de Satan et qu'on les a battus et vaincus car il y a des diables corrompus"
Il avait donc de bonnes raisons, en pays luthérien, de s'intéresser aux esprits frappeurs. Dans l'Histoire de la folie (Oeuvres I, Pléiade I, 69-72) il lie cette présence permanente des démons à une condamnation morale de la misère, qui n'est plus, comme chez les catholiques, sanctifiée, ce qui va conduire notamment à l'installation d'asiles dans les couvents.
D'un autre côté la question des poltergeisten est complexe, car ils étaient aussi invoqués par les papistes pour signaler les punitions des vivants qui n'avaient pas assez respecté les sacrements et les oeuvres. Luther aurait donc dû les rejeter.
https://www.en-attendant-nadeau.fr/2019/09/24/chasser-fantomes-histoire/ | |
Bon, au vu de la tonalité de ce dernier billet, l'ignare que je suis va tenter de vous délivrer de la tentation ingrate d'enseigner quoi que ce soit à la misère inculte et maudite. J'aurais pu certes enchaîner directement sur quelque référence à la sorcellerie ou autre démonologie, plus on est de fous ... Je m'en vais me renseigner plus avant sur cette histoire de conception de la folie par l'oeuvre du diable qui me paraît -un poil- tiré par les cheveux. Un psychotique, qu'on le destine au royaume des cieux ou au feu de l'enfer, admettons que cela influe peut-être sur la manière dont une société le traite, reste à voir s'il en est plus ou moins psychotique pour autant ... Au temps du moyen-âge catholique qui précède, qu'est-ce qu'on en faisait...on tapait la causette avec en lui faisant des bisous ?
RépondreSupprimerignorant ne veut pas dire ignare. Cela veut dire qui ignore ce dont il est question: ignoratio elenchi
SupprimerMichel Foucault avait dû voir aussi "La Charrette fantôme" de Victor Sjöström, et "Vampyr" du Danois luthérien Carl Dreyer. À la fin d'"Ordet" de Dreyer, un miracle de la foi ressuscitait une morte.
RépondreSupprimerChez nous, dans les années 1950-60, Bergman était très difficile à voir, hormis au Festival de Cannes et dans des salles d'art et d'essai à Paris. Bergman faisait surtout du théâtre et des films artisanaux d'inspiration néo-réaliste, assez déprimants, et il ne quittait jamais la Suède. J'ai pu voir "Monika" par hasard, en ciné-club scolaire après 1968, quand il n'était plus classé dans le cinéma érotique. Mais j'avais mal au cœur et je pensais : "Mon Dieu, ça va être ça, l'amour entre une fille et un garçon !". Godard nous expliquera plus tard que l'important, c'est quand Monika regarde la caméra avant de retromper son mari. Cela explique peut-être la fin de "Une femme est une femme" de Godard : "Angela, tu es infâme. -Non, répond-elle, je suis une femme.".
Lorsque Bergman a quitté la Suède pour des raisons fiscales, il a eu enfin accès aux capitaux et aux studios internationaux. On a pu voir dans tous les cinémas du monde ses grands films des années 1970-80 ("Cris et Chuchotements", etc.).
Il y a ensuite eu des festivals à Paris et en province, où j'ai pu voir tardivement le très existentialiste "Septième Sceau", "Les Fraises sauvages" et "Persona", son film le plus déroutant par son aspect expérimental. La TV a eu aussi l'idée de nous montrer les tout premiers Bergman, une curiosité.
Si on ne connaît pas bien Ingmar Bergman, il aura tout fait pour cela !
Quant à Luther, quand on en parlait à Paris dans les années 1960-70, on vous répondait : "Luther ? Martin ?". On s'attendait plutôt à Claude, le jazzman du Club des Lorientais. Michel Foucault avait bien de la chance, de pouvoir lancer le débat sur Luther, sans passer pour Trissotin !
Bergman a été fort connu en France à partir de 1957 (le septième sceau, qu'on voyait dans tous les bons cinémas) et j'ai vu une rétrospective de tous ses films au Racine en 1972. Quand Truffaut dans les 400 coups reprend l'image de Monika en 59, c'était un film fort connu.
RépondreSupprimerEn psychiatrie, on parle souvent de xénopathie, il peut y avoir un lien par exemple entre les tendances dissociatives psychiques (hallucination auditive) et l'imaginaire de la possession et de l'exorcisme, qui tend toutefois à être remplacé aujourd'hui par l'idée de persécution étatique avec surveillance technologique complotiste à capacité télépathique..., les symptômes sont dans les grandes lignes les mêmes, bien que les contenus interprétatifs des malades vont avec leur époque. Quant aux interprétations de certains intellectuels, ils présentent parfois une curieuse parenté ...
RépondreSupprimerPersona fût le premier exemple dans le genre qui exploitait à ce point les concepts psychanalytiques (de façon beaucoup plus direct que ceux qui l'avaient précédé, moins simplement symbolique, en jouant davantage sur les coupures formelles et narratives pour renforcer frontalement le trouble) : projection, identification, transfert, inversion des statuts des personnages, de dominant/soumis, double inversé, bipolarité, etc... Plus besoin de poltergeist ? Toutes choses qui furent reprises et développés par d'autres ensuite.
Il ne faudrait enseigner qu’à ceux qui savent déjà, voire n’enseigner qu’à ceux qui en savent davantage que nous sur une question donnée, ainsi se débarrasserait-on du pénible problème de l’apprentissage.
RépondreSupprimerCerise sur le gâteau : on se conformerait alors au jargon pédagogique actuel, où l’on considère qu’« apprendre » est un bien vilain mot, sans doute à raison (bien qu’à titre personnel, je n’ai jamais été capable d’accéder à ces raisons, ignorant bien heureux que je suis).
On peut enseigner à deux sortes d'ignorants: ceux qui savent déjà des choses, et ont une méthode, mais veulent apprendre plus ; ceux qui ne savent pas grand chose, mais sont de bonne volonté et ont le désir d'apprendre. Mais en effet, avec ceux qui ne savent rien et ne veulent rien savoir, c'est peine perdue. C'est de ces derniers qu'il était question. Mais si l'on en croit Nietzsche et Foucault il n'y a pas de volonté naturelle de savoir, et le savoir est toujours indépendant de la volonté (Leçons sur la volonté de savoir, 1971)
RépondreSupprimerBon bein vu que ça reprend sur le sujet, je me permets moi-aussi : l'ignorant est-il celui qui ne veut rien savoir et ne sait rien de la question ou ne veut rien savoir en général (dans ce cas je ne vois pas de différence avec l'ignare) ? L'ignoratio elenchi semble être solide, mais il ramène à la question de la fixité ou mobilité de la signification de la question. Qui plus est dans le contexte d'un enseignement allusion rébus, ça ne facilite pas la tâche pour l'intervenant.
RépondreSupprimerEn effet, ce blog est fait de billets allusifs ( je l'ai ditdans mon premier post il y a dix ans "to kill a blogging bird"). Il ne donne pas de cours. Cela n'empêche pas que certains sujets y soient traités. Il a, si vous voulez, un style littéraire. Il se prête de ce fait mal aux interventions , surtout en porte à faux.
RépondreSupprimerD'accord, je jette l'éponge.Bonne continuation.
RépondreSupprimerSi une personne, de bonne foi, est ignorante de la question ou se trompe sur celle-ci, on peut lui expliquer en quoi, ou bien lui dire qu'on ne dispose pas de la disponibilité suffisante pour lui expliquer, mais qu'en effet elle se trompe. En revanche, rien ne justifie de lui dire carrément : il est vain de vous expliquer ou de vous apprendre quelque chose du moment que vous ne connaissez pas le sujet. Vous pouvez dire : ce n'est pas le lieu ni le temps pour pouvoir vous apprendre, expliquer le sujet. Vous ne pouvez pas dire : il est vain de vous apprendre ou expliquer le sujet. Ce n'est plus un renvoi à l'ignorance, mais à la bêtise ou au vice complaisant de la personne, rejetant sa bonne foi. Est-ce qu'un tel jugement (qui frise l'insulte) vous paraît justifié dans les commentaires sur vos billets ?
RépondreSupprimerVous avez beau ensuite rétablir des distinctions, vous l'avez dit de façon très sèche et courte à des commentateurs qui, ma foi, méritaient cette nuance dès le début dans le traitement.
A moins que vous ne jugiez donc que l'erreur des commentateurs est plutôt une faute morale. Je crois surtout qu'ils n'étaient pas dépourvus de bonnes intentions, malgré leur erreur. Certes, l'enfer en est pavé. Encore que pour leur cas, je ne dirai pas qu'on en est déjà là. Ils n'ont pas prétendu en comprendre plus que le contenu narratif de votre billet, ont essayé d'y prendre garde dans la limite de leurs moyens, bien qu'ils se soient montrés négligents sur ce qu'il pouvait suggérer de plus. Ils ont mal compris et connaissent mal le sujet, mais ne se sont pas montrés outranciers ou pédants, pas au point d'en conclure qu'il serait vain de leur en apprendre quelque chose.
donc les conseils de Sénèque ( relayé par Foucault) vous semblent idiots ? Admettons, un sage peut se tromper. Quant à moi, en effet, je fais mes petits billets sans doute peu pertinents, et suis ravi qu'on les lise et les commente. Mais si je reçois sur chacun près de dix commentaires de 50 lignes qui sont à côté de ce dont il est question, en effet je me considère comme ayant, comme dit le proverbe, oleam perdidi. On peut se tromper certes, et ne pas voir dans des billets sur Foucault que cela porte sur l'oeuvre et la vie de Foucault, ou que l'évocation de l'universel par P. Boucheron aux Jeux Olympiques n'appelle pas une dispute décalée sur les universaux, mais le temps d'un blogueur n'est pas infini au point de se sentir devoir répondre à tout commentaire à côté de la plaque.
RépondreSupprimerRassurez vous, le vôtre ne l'est pas!
Comme quoi, puisqu'il s'agissait de moi (l'oubli du pseudo n'est pas volontaire) il peut m'arriver de ne pas être à côté, c'est toujours ça. Sénèque rappelle aussi que l'enseignant a à s'interroger sur sa propre manière de procéder... De plus, vos propos ici ne disent pas exactement la même chose que ce que vos propos ont dit auparavant. Enfin, je reconnais que sur les universaux, vous m'avez mis sur la voie sur un sujet important de façon très féconde. Mais il m'a fallu ramer. Peu importe, je ne vous importunerai plus. Je vous souhaite bien le bonsoir.
RépondreSupprimermais vous ne voyez toujours pas que le billet sur les jeux olympiques ne portait pas sur le problème des universaux, mais sur l'universalisme supposé de l'historien, et que les billets sur Foucault parlaient de Foucault... j'ai essayé de vous le dire , mais vous avez persisté. Le professeur doit s'adapter, les élèves aussi...
RépondreSupprimerSi l'adaptation va bien dans les deux sens (je n'ai pas dit : à égalité), d'accord. Il me semble, peut-être à tort, selon qu'on est universaliste transcendant ou pas, on n'entend pas tout à fait la même chose de l'universalisme supposé de l'historien. Mais j'admets que ce qui m'intéressait, moi, c'était de mieux comprendre la problématique, pourquoi tant de philosophes n'étaient pas d'accord. Et vous m'avez mieux fait comprendre. Mais ce n'était pas votre but et je vous ai fait perdre de votre temps, ça, d'accord. Pour Foucault, oui, je me suis trompé : j'ai pensé que vous étiez sur une option narrative plus récréative traitant éventuellement du rapport à l'irrationnel au sens large. Je n'en ai pas assez lu, mais j'ai toujours trouvé curieux chez Foucault l'idée que le traitement et l'isolement du malade mental, ou l'enfermement dans le statut de la misère, commencerait surtout avec la réforme et l'âge dit classique. Le moyen-âge ne semble pas nécessairement mieux traiter ces sujets, sauf peut-être symboliquement..., même s'il semble qu'on est moins dans une systématisation générale mais avec beaucoup de disparités des traitements, mais là je n'en sais rien, je n'ai pas la culture suffisante pour savoir ce qu'il en est du rapport entre rationnel et irrationnel à cette échelle, et encore moins : sur le rapport propre de Foucault au surnaturel, ce qui est le vrai sujet, si j'ai compris. Et je ne vais pas recommencer à interroger, et oui : ça me disperserait encore plus. Alors pour ENFIN finir : malgré les malentendus, merci pour tout.
RépondreSupprimermais non, le sujet n'est pas "Foucault et l'irrationnel". Mon conseil: avant de vous lancer dans toutes sortes de commentaires, lisez: pas seulement moi sur ce blog, qui suis , j'en conviens, assez elliptique (même si pas cryptique), mais les auteurs dont je parle.
RépondreSupprimerJe viens de terminer "Histoire de la folie..." (que, il est vrai, je n'avais pas lu jusqu'au bout il y a trente ans). C'est un peu plus clair, mais pas tout, loin de là. Je devrais sans doute enchaîner sur d'autres ouvrages de l'auteur, voire une biographie, mais j'ai d'autres priorités (notamment de lecture sur les universaux). Ces six derniers mois, j'ai tout de même pas mal lu en fonction des sujets abordés sur vos billets (j'ai eu un problème d'accès aux autres livres de Benda, mais bon : de Swift à Moore en passant par la méta éthique que je ne connaissais guère, deux de vos livres et une révision de Platon, Hume et Kant sur des passages précis, en comparant à d'autres commentateurs des oeuvres de ceux-ci, pour mieux confronter à certains de vos propos ... Je peux donner les références si demandées et expliquer, mais cela serait long et hors-sujet.). Je vais plutôt me consacrer perso à ce sujet des universaux. Je souhaite tout de même une bonne route à votre ouvrage. Pour Foucault et le reste donc ... D'ici quelques années peut-être. A chacun ses priorités. Mais oui, mieux vaut se consacrer à lire les vrais livres (qui présentent déjà suffisamment de difficultés de compréhension comme cela pour ne pas en rajouter sur les écrans), plutôt qu'à s'empêtrer vainement dans des devinettes réservées aux initiés. L'ignorant aurait dû certes au moins deviner qu'il ignore. Et rester à sa place. Que voulez-vous, le vice aime à s'aveugler.
RépondreSupprimerBon, il y aura eu tout de même le rappel et la découverte de classiques négligés. Dans la mesure de ce qui y fût compris, l'ignorant y pressent au moins la pertinence à rappeler un certain souci de vérité, davantage toutefois qu'il n'en a bien perçu la démonstration, au delà de la déclaration générale d'intention. Et puis, il y a eu pour lui un sujet philosophique central à creuser. Pas totalement rien, donc. A voir si cela s'avèrera pour lui fécond ou vain.
Quant à conclure plus globalement ... pour ce qui est de ce qui donne à tout cela épaisseur proprement humaine dans l'attitude appliquée ... Et avec ce que suppose de malentendu autistique ce qui se fait sur internet ... Que de temps perdu en effet, aussi bien pour l'enseignant que l'ignorant. Mais pas exactement pour les mêmes raisons que celles avancées. L'immoralité de la bouse bovine est une chose. Quant à savoir si culture et connaissance garantissent la lucidité morale et précision circonscrite sans tâche du supra savant dans sa façon de procéder, c'en est une autre. Mais le monde réel ne carbure pas qu'au manichéisme. Ni à l'omniscience sans faille des déterminismes premiers. Ce qui ne signifie pas que toute estimation se vaille. Bien qu'entre absoluité ou relativité de l'argumentation proposée selon sujet traité, oui, il m'est arrivé souvent d'hésiter.
RépondreSupprimerReconnaissons à l'ignorant qu'il peut au moins à bon droit avoir une légitime perplexité devant maintes querelles perpétuelles entre savants, ou plutôt philosophes, se renvoyant la bouse condamnable en un ping-pong sans fin, pour ce qui est de la meilleure compréhension. Chacun pointant du doigt tel ou tel aspect, rarement le même, voyant la faille en son voisin et non celle en sa propre maison, et presque jamais d'accord au final, au nom même de la justification intemporelle et universelle. Un peu comme si chacun était un sophiste pour l'autre.
L'ignorant, qui saurait se tenir à sa place assignée, à défaut d'en tout comprendre, leur laisse alors prudemment le soin de conclure, si tant est que ce miracle devait advenir.
Mais si les initiés parviennent déjà sans peine à s'entendre et à développer à minima, ne serait-ce par exemple que sur le sujet précis de ce billet, ce serait au moins un premier pas propice à l'éclaircie, en effet. Qui donnerait peut-être le goût et l'audace à un ignorant de passage d'ouvrir un livre à ce sujet. Ou le convaincrait définitivement que ce n'est décidément pas pour lui.
je suis ravi de vos commentaires, souvent justes. Mais il y a un malentendu permanent: vous semblez attendre de moi que j'explique mes allusions, mes billets, et que je donne un cours de philosophie. Ce n'est pas mon intention ici, et je n'en ai pas envie. Sans quoi je n'utiliserais pas le format du blog, qui est un peu pour moi un journal un peu décalé. En revanche je me suis souvent consacré à la pédagogie, par exemple dans Epistemologie pour une marquise. Si j'ai parlé ici de Foucault c'est parce que je l'ai relu tous ces derniers mois. Mais quant à faire un cours sur lui, j'ai déjà donné.
RépondreSupprimerC'est au moins un avantage minimal de l'écrit. Quand on y revient à se relire plus tard, avec recul et dans l'ensemble des billets, vous aviez raison sur mon cas. C'est sidérant d'avoir à ce point une velléité de dire alors même qu'on n'a pas tant compris le sujet et encore moins surtout grand chose à en dire. A de rares exceptions près. Et l'explication d'un tel comportement est hélas d'une banalité affligeante : le m'as-tu-vu avant même d'y voir quelque chose ... Mais s'en rendre compte est au final moins dur que d'un gain de clarté déjà au moins sur soi inestimable. Je ne prétends pas être à l'abri de toute rechute, mais là : le retour sur soi est particulièrement frontal et opportun. Il convient d'abord de se taire pour y entendre. Et je crois qu'il ne faut pas avoir peur de n'avoir rien à dire, et même qu'il vaut mieux moins exister aux yeux d'autrui plutôt que d'y pseudo exister à tout prix de façon fort déviante. Et que ne pas dire ou ne pas être reconnu n'empêche en rien la priorité plus qu'indiquée d'écouter et de reconnaître d'abord. Même pas forcément autrui. Mais son propos : s'il y a bien là quelque chose à reconnaître et par là-même qui soit vraiment susceptible de nous y reconnaître.
RépondreSupprimerle blog ne favorise pas le retournement de la langue 7 fois dans sa bouche. Mais c'est quand même mieux que les réseaux dits sociaux, où on dégaine plus vite que son ombre.
RépondreSupprimerOui, au vu des échos que j'en ai de ces réseaux, ne serait-ce qu'en m'asseyant moins d'une heure à un comptoir et en écoutant ce qui s'y raconte : sans comparaison aucune. Et la pertinence de certains de vos billets d'une manière ou d'une autre tracent aussi leur chemin en ma petite personne. Je continuerai à vous suivre sans souci, mais d'un peu plus loin et moins pressé.
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